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Penny Oleksiak, une adolescente en plein développement de son potentiel en natation

Articles de fond –

par Jim Morris

Par moments, l’an dernier, Penny Oleksiak se sentait comme une jeune pouliche dégingandée qui n’arrive pas à maîtriser ses membres.

La jeune fille de 16 ans qui mesure maintenant près de 1,83 mètre (6 pi 1 po) a grandi de près de 3 centimètres. Elle a vécu des jours pénibles : son cerveau savait ce qu’elle voulait faire, mais son corps ne recevait pas toujours le message.

« Cela peut sembler sans grande importance, mais en natation, c’est bizarre », affirme la Torontoise qui s’entraîne au Centre de haute performance de l’Ontario.

« Quand je grandis de quelques centimètres, je ne sais plus où placer les bras pour tirer l’eau. Mon battement de jambe n’est plus coordonné au mouvement de mes bras. C’est n’importe quoi. »

Même aujourd’hui, alors qu’elle se prépare aux Jeux olympiques qui se tiendront cet été à Rio, Penny sent que son corps change.

« Il y a bien des jours où j’ai l’impression de ne pas connaître mon corps, dit-elle. J’ai une poussée de croissance et je ne peux pas nager correctement parce que je ne sais pas ce que je fais. »

Ben Titley, entraîneur-chef de l’équipe olympique canadienne, affirme qu’il a constaté des changements chez Penny depuis trois ou quatre mois.

« La jeune fille est en train de devenir femme », déclare M. Titley, qui est aussi entraîneur de Penny au Centre de haute performance de l’Ontario. « Elle gagne de la force. »

« Il faut juste se croiser les doigts et espérer qu’elle n’ait pas une autre poussée de croissance juste avant ou pendant les Jeux olympiques. Le problème reste que le corps a tendance à grandir quand on commence à lui accorder une pause ou un temps de repos. »

Penny a connu une performance extraordinaire pendant les Essais olympiques et paralympiques canadiens du mois d’avril où elle a fracassé trois records.

Elle a remporté le 100 m libre en un temps record pour le Canada, 53,31 secondes, ce qui constitue aussi un record mondial junior. Elle a aussi gagné l’épreuve du 100 m papillon en 56,99 secondes, ce qui a fait d’elle la première Canadienne à franchir le seuil des 57 secondes. Elle s’est aussi qualifiée pour les Jeux olympiques dans l’épreuve du 200 m libre et dans les relais du 4×100 m et 4×200 m libres.

Avant les Essais, Penny aurait été bien heureuse de faire partie d’une des équipes de relais.

« Je n’aurais jamais imaginé me qualifier pour trois épreuves individuelles, dit-elle. J’ai l’impression de rêver. »

À certains moments, l’an dernier, Penny qualifiait de chimère ses espoirs olympiques. Chaque poussée de croissance nuisait à sa performance en natation.

« J’ai connu des périodes difficiles, dit-elle. Je pensais que tout allait bien et, tout à coup, j’avais une poussée de croissance et c’était un désastre. »

« C’était plutôt frustrant, mais j’en suis sortie. »

Pendant la plus grande partie de cette période, la jeune nageuse s’entraînait avec Bill O’Toole au Toronto Swim Club. Elle voyait Ben Titley une ou deux fois par semaine.

Selon ce dernier, il fallait simplement faire preuve de patience et respecter la nature. Il a diminué les entraînements matinaux de Penny pour qu’elle ait plus de temps de repos.

« Il faut laisser les jeunes grandir, récupérer et se développer », ajoute-t-il.

« Je pense qu’elle a à peu près fini de grandir. Quand une fille mesure 1 m 83, c’est déjà pas mal. J’aimerais bien qu’elle gagne 3 ou 5 centimètres, mais si cela arrive, ça va se faire sur une période de 5 ans, par opposition aux deux dernières années où elle a pris 15 centimètres. »

Pendant les poussées de croissance, les entraîneurs travaillent surtout à améliorer la vitesse de Penny en papillon et non en style libre, parce qu’elle arrive mieux à contrôler ses mouvements au papillon.

« C’est l’une des raisons pour lesquelles elle n’a pas participé au50 m libre aux Essais, explique Titley. Nous ne pensions pas qu’elle avait l’habileté physique de faire un sprint en nage libre aussi bien qu’elle pourra un jour le faire. »

La carrière de natation de Penny a failli se terminer avant même de commencer.

La grande jeune fille aux longues jambes avait essayé sans succès de se joindre à plusieurs clubs de natation de Toronto, car elle n’arrivait pas à nager une longueur de piscine.

« De toute évidence, je n’étais pas la meilleure », commente Penny.

Finalement, Gary Nolden entraîneur au Toronto Olympian Swim Team l’a accepté et lui a donné les bases dont elle avait besoin.

« Cet entraîneur m’a vraiment beaucoup aidé, dit Penny. Il croyait en moi. Si je n’avais pas fait partie de ce club, je ne pense pas que j’en serai au point où je suis arrivée aujourd’hui. »

Penny s’est entraînée par la suite avec Bill O’Toole, et c’est à ce moment que Ben Titley l’a remarquée.

Malgré toute l’excitation de ces premiers Jeux olympiques, Ben n’y voit qu’une première étape du parcours de Penny.

« Ce n’est que le début, vraiment », ajoute-t-il.

La plupart des nageuses de style libre n’atteignent pas leur sommet avant le milieu de la vingtaine. Dans le cas de Penny, elle n’atteindra son plein potentiel qu’aux Jeux de 2024.

« C’est à ce moment que les nageuses acquièrent une force optimale et sont vraiment conscientes de tout, explique-t-il. Nous ne savons pas encore où se tiendront ces Jeux olympiques, mais nous savons que c’est là que Penny sera au sommet de sa forme physique. »

En plus de gagner en force, Peny apprendra des stratégies de course et pourra décider des nages sur lesquelles elle veut se concentrer.

« Mieux vaut exceller dans un domaine que de performer de façon satisfaisante dans cinq, affirme son entraîneur. Nous allons nous orienter. Nous verrons à quelles épreuves elle s’intéresse naturellement ».

Même si elle est novice, Penny a mis la barre haute pour Rio.

« Je veux me rendre en finale et viser le podium, même si cela peut sembler un peu fou en ce moment », dit-elle.

Les épreuves de natation aux Jeux olympiques de Rio auront lieu du 6 au 13 août.